Humanum

Qui est humain

Ranomafana

Rédigé par λβ / 16 avril 2024

Nous sommes dans les collines encore boisées, elles-même enfoncées dans les nuages qui s'y sont posé, et l'on sent leur relation intime, les unes émanant des autres, la vapeur s'élevant, froide. Réellement, l'enveloppe nuageuse rase et s'agrippe, des morceaux s'arrachant quand d'autres s'élèvent mollement de la végétation. Tout à l'heure je marchai dans le village. Les passants et les commerçants sont ici habitués à voir des touristes et des étrangers.

Calmes. Nous seront tous calmes et silencieux dans la mort qui arrive. Parfois j'en ai peur. Est-ce son approche, son imminence, quelque chose qui meurt en moi, change et renaît ou arrive sous une forme nouvelle ? Le sentiment d'assister au flux du changement, à une modification qui a lieu accompagnée par bien des signes. Dans une heure il fera nuit. Même si le personnel bavarde à trois pas de là dans le local attenant à la cuisine du restaurant, la journée mourra bientôt, ensevelie sous la brume qui se noie déjà dans la chevelure boisée des pointes et des dômes qui nous entourent.

Bordant le chemin pavé, il y a une courte haie. Les petites feuilles lui donnent ces couleurs jaune-vert, elle est soigneusement taillée et cache un muret de briques ajourées, une bande humide et brunie la recouvre, elle présente des taches de mousse. Trois pots de terre contenant des espèces de plantes communes, avec à une extrémité un cabanon marqué par l'humidité, séparé d'un jeune papayer chargé de fruits encore bien verts.

La pluie a recommencé, doucement mais assez néanmoins pour qu'on entende sa musique magique. En tombant sur les tuiles de l'abri où je me trouve, les tôles des auvents proches, sur les pavés rustiques du chemin ou auto-bloquants des cursives, ou encore en forme de fontaine à la base d'un tuyau d'évacuation des gouttières, plus discrètement des feuilles des arbustes dans le jardin. La mélodie microscopique des petits tambours par millions. Et lorsque l'averse se calme, toujours les plus grosses timbales, les grands fûts des gouttes majeures dans les flaques et les réservoirs qui se sont formés et restent encore à jouer après que l'eau a cessé de tomber. Pendant ce temps, les nuages sont descendus le long des pentes, ils recouvrent complètement les sommets, ne laissant derrière le papayer que quelques arbres se découper sur une crête, un pâle aplat de vert sombre dans un voile de brouillard morne.