Humanum

Qui est humain

Fianarantsoa

Rédigé par λβ / 08 février 2025

Depuis Antsirabe je retrouve la RN7 de « La belle route d'Ambositra » filmée il y a quelques mois. Je retrouve aussi ma petite gargote à café à l'entrée de la ville-étape, porte d'entrée du Pays Betsileo.

La journée de roulage comporte trois tronçons de deux fois 90 kilomètres et 60 encore avant Fianarantsoa. Il y a des travaux en cours en sortie d'agglomération, ils ont avancé sur 28 kilomètres, aux alentours d'Ivato. Je croise une équipe réduite, visiblement envoyée par le ministère des travaux publics, qui s'applique à étaler des rustines de goudron sur la ribambelle de trous soigneusement numérotés auparavant, et à recouvrir les sections grattées il y a deux ans. Puis l'on retrouve les parties de la route encore « intouchées », en attente de leur traitement. Je ne fais pas attention au croisement avec la RN35, cette piste à l'autre bout de laquelle je me trouvais au mois d'août, après Malaimbandy, une fois parvenu à Morondava. A la sortie d'Ambohimahasoa, je m'arrête de nouveau au niveau du départ de la RN25 en direction de Ranomafana, avec sa barrière qu'on contourne à pieds ou en moto légère. Là aussi, il y a toujours la petite cabane sur le bord de la chaussée où on me réchauffe une tasse sans grande teneur en café. Quatre petits enfants et un homme ivre tournent autour de moi, ils sont mignons (les enfants), trois fillettes aux cheveux courts avec leurs seules boucles d'oreilles pour les distinguer du petit gars qui se tient un peu plus à l'écart.

Le paysage en terres Betsileo me plaît, il y a quelque chose, comparé à la région d'Antsirabe, plus au nord, les maisons sont plus coquettes, je remarque quelques belles bâtisses qu'un palmier majestueux, planté dans le jardin entourant les lieux qu'on croise à 70 km/h, embelli d'une certaine noblesse champêtre. Cela arrive à plusieurs reprises, assez pour faire naître ce sentiment et imprimer leur souvenir jusqu'à maintenant. Je m'imagine une hiérarchie dans la paysannerie que je traverse à longueur d'année, sur les Hautes-Terres notamment. Couleur des briques, paysages devenant montagneux, contreforts du massif de l'Andringitra, atténuation des constructions contemporaines cubistes montées à la va-vite, comme dans l'urgence... Possible, que ce soit ce passé, moins pressé et vaguement idéalisé, qui réapparaisse.

Depuis l'hôtel où je séjourne, j'ai tourné en ville, me perdant dans un verre d'eau ; tous les croisements sont la rencontre de trois, quatre, parfois cinq demi-droites en étoile ou en patte d'oie, donnant cette impression de complexité à un plan biscornu, un quadrillage même parfois tordu de montées et de descentes entre les grandes artères parallèles, une fois qu'on observe un plan de la ville. Le centre est relativement petit en réalité, quelques rues sinueuses entourent la ville moyenne, lui donnant le tour alambiqué dans lequel je m'égare quelques minutes le temps de retomber sur mon chemin, les repères dans la Haute Ville notamment indiquant à tout instant les points cardinaux. Sur le tracé de la route nationale s'enfilent l'avenue qui conduit à l'ancienne cité, la gare, départ de la ligne ferroviaire FCE en direction de Manakara, le stationnement des taxi-brousses ainsi que la plupart des stations service. Sur les côtés et à l'ouest surtout, les rues parallèles entourant le stade et montant en s'y retrouvant à l'entrée de la Ville Haute.

Je m'y rends à moto et gare l'engin déchargé de ses bagages sur le parking, en bas des marches. On grimpe les longues volées de pavés entrecoupées de plus petits escaliers resserrés. Des églises. La plus ancienne date de 1859. On dit – enfin on l'a même inscrit sur un écriteau – que ce fut la première érigée dans le Sud de Madagascar. Je retrouve les souvenirs de ma précédente visite : ruelles proprettes, maisons entretenues mises en avant, entourées de celles plus délabrés du reste des habitants du quartier du Rova. A tout instant une coursive, un petit chemin pavé donne sur une vie panoramique de la ville en contrebas et des collines environnantes. Fianarantsoa est une ville globalement restée dans le passé, je la compare souvent à Tananarive, sa grande sœur d'Analamanga, par les points de comparaison que l'on peut établir. Collines, Ville Haute, moyenne et basse. Artères et tissu de petites rues sinueuses, rizières demeurant en plaine urbanisée, types d'habitats. Les plans à long terme de la monarchie du XIXème siècle se sont arrêtés là, dans les années soixante du siècle passé peut-être. Ce sont Antsirabe et Tamatave qui ont grossi. Fianarantsoa est surtout la capitale de la région Sud-Est désormais, avec ses villes tombées en désuétude : Manakara, Farafangana.... Mananjary notamment, qui a perdu son port, le deuxième du pays à une époque où l'exportation des produits locaux remontés via le Canal des Pangalanes – le plus vaste chantier réalisé entre les années 1896 et 1940, avant les lignes de chemin de fer et les routes nationales même – faisait de la ville l'une des plus peuplées du pays.